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[Grognard]_Cosak
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    De la nullité scientifique des politiques

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    De la nullité scientifique des politiques Empty De la nullité scientifique des politiques

    Message par [Grognard]_Brumaire Lun 9 Déc 2013 - 18:40

    Le niveau en mathématique des jeunes français décline lentement comme le montrent année après année les classements PISA.

    Malheureusement, celui de ceux qui prétendent accéder au pouvoir n'est pas meilleur.

    Lamentable

    Marine Le Pen qui ambitionne de devenir Présidente de la République, ne connaît pas la valeur du PIB français, pas plus que celle du budget de la Défense. Ni des masses monétaires qu'elle prétend transférer !

    L'assemblée nationale mentionnait début novembre sur son site que 7% des députés avaient suivi une formation scientifique. A l'autre boût du monde, 13 des 13 membres du bureau politique du PCC sont issus de ce sérail.

    Dans un monde de plus en plus technique et complexe, peut-on laisser la gouvernance de notre pays à des avocats, ou tout du moins des analphabètes du calcul ?


    Dernière édition par [Grognard]_Brumaire le Lun 9 Déc 2013 - 20:19, édité 1 fois
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    Message par [Grognard]_Cosak Lun 9 Déc 2013 - 19:04

    Aucun président américain n'a jamais eu la moindre formation scientifique, ni aucun grand gouvernant au niveau mondial. Les avocats règnent en maîtres, suivis des militaires, dans ce secteur. Ceci n'a rien d'étonnant : qui, en politique, a besoin de méthode et de rigueur ? Tout le monde s'en fiche, et quand un candidat argumente rationnellement (ie Chevènement dans les années 1990-2002) il passe pour un zigoto ou un extrémiste car il pose des questions rationnelles mais dérangeantes.

    Et que dire de la médiocre "élite scientifique" française, qui passe à Polytechnique pour intégrer (à 75%) la banque ou l'assurance ? Bref, la science, la vraie, celle qui avance avec des démonstrations et des données vérifiables et reproductibles, n'a sa place ni dans la vie publique, ni chez les décideurs qui vivent dans l'entre-soi.
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    Message par [Grognard]_Brumaire Lun 9 Déc 2013 - 19:42

    Plus que la science pour la science, je défend la méthode scientifique, garante de raisonnements consistants et cohérents. Son questionnement incessant et la conscience de ses limites, ses postulats et failles la rend universelle.

    Cosak, je t'invite à suivre les conférences d'Etienne Klein, physicien au CERN et particulièrement pertinent en philosophie des sciences. Il théorise actuellement le crépuscule de "l'aventure scientifique", période qu'il fait démarrer à la Renaissance et Galilée, et dont il prédit la fin pour bientôt.

    A mon avis, la perte de foi en le Progrès est à incriminer pour expliquer cette chute des vocations.
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    Message par [Grognard]_Cosak Lun 9 Déc 2013 - 19:50

    Je suis bien conscient du "crépuscule scientifique". Mais il est la faute des marchands et financiers, pas des politiques, ni des avocats, au pouvoir. Au contraire, malgré les défauts évidents de la classe politique, ils sont les meilleurs garants du statut de la science (car ils ont une culture littéraire, donc aussi portée vers l'abstraction).

    Malheureusement les avocats cèdent le terrain face aux esprits marchands, qui voient les raisonnements rationnels comme autant de menaces face aux vagues du marketing et des produits dérivés.
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    Message par [Grognard]_Gourgaud Lun 9 Déc 2013 - 20:57

    Putain, je suis dans la merde.
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    Message par Fortuna Mar 10 Déc 2013 - 14:04

    Je ne serais pas aussi catégorique que Cosak pour affirmer qu'"aucun grand gouvernant mondial" n'est issue d'une carrière scientifique, cependant il est vrai que les cursus juridiques et politiques sont prépondérants.
    Je suis loin d'être persuadé que ce soit une mauvaise chose. Qu'il y ait des gens formés à la méthode scientifique au pouvoir pourquoi pas, mais attention à la dérive qui porte un nom : une technocratie. C'est un vieux rêve de croire qu'en mettant des savants au pouvoir tout va s'arranger. Le fait est que ces savants sont après tout des hommes comme les autres, susceptibles d'être grisés par l'exercice du pouvoir et faillibles sur le plan purement scientifique, bien loin de l'image d'exécutants mécaniques implémentant des solutions rationnelles. J'en veux pour exemple l'expérience lusitanienne désastreuse qui s'acheva par le retour à la souveraineté du peuple lors de la Révolution des oeillets : Salazar était un éminent professeur d'économie dont la renommée a conduit les dirigeants de l'époque à lui conférer un ministère pour régler les turpitudes que connaissait alors le Portugal. On connaît la suite... Autre exemple: la Commission Européenne, pierre angulaire de l'UE, suit les impulsions données par ses technocrates... Je n'ai pas l'impression que les peuples européens aillent beaucoup mieux, c'est même le contraire: ces férus de sciences économiques sont entrain de nous envoyer directement contre le mur.
    De plus, le principe d'une technocratie rentre directement en contradiction avec celui d'une démocratie. A moins que vous ne préfériez véritablement une société dans laquelle seuls les docteurs et les ingénieurs aient voix au chapitre (enfreignant ainsi notre sacro-saint principe d'Egalité des citoyens), le concept même de gouvernement des savants doit vous rebuter.
    Vous parlez ensuite d'"un crépuscule scientifique", je souhaiterais vous voir étayer un peu cette hypothèse que j'avoue ne pas comprendre. Je dirais plutôt qu'on est dans le stricte opposé de ce que je crois comprendre dans votre expression. Le progrès scientifique n'a jamais été aussi fulgurant et "reconnu" qu'aujourd'hui. Le fait est que politiques comme simples citoyens, tout le monde invoque la science, la raison, pour supporter ses arguments.
    Je tendrais donc à avancer le contraire: la science est liée au débat public (OGM, Réchauffement climatique, utilisation de l'atome, nanotechnologies...), le sera de plus en plus à l'avenir, et donc fera l'objet de l'attention des politiques.

    PS : il n'y a pas que Polytechnique qui forme des ingénieurs et chercheurs de haut vol...
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    Message par [Grognard]_Brumaire Mar 10 Déc 2013 - 17:01

    Fortuna a écrit:mais attention à la dérive qui porte un nom : une technocratie.

    Je partage la même réserve quant aux régimes technocratiques. Cependant, ta perception du terme, est à mon avis, trop scientifique, peut-être à cause du préfixe "techno".

    D'après le Larousse, une technocratie est un :

    Système politique ou économique dans lequel les experts, techniciens et fonctionnaires supplantent, en fait ou en droit, les responsables politiques dans la prise des décisions (souvent péjoratif).

    L'économie n'est pas une science, en ce sens qu'elle ne peut établir de vérité "une fois pour toute", ou au moins avec un degré de stabilité important à l'échelle humaine.
    Un gouvernement technocrate d'économistes ne doit pas être confondu avec un gouvernement de savants. Regarde la différence d'approche entre le GIEC et la Troïka !

    L'idée de mon post n'était pas d'encourager la constitution de groupes anti-démocratiques, qui parce qu'ils sont "sages", et "omniscients" peuvent gouverner sans le peuple, "dans son propre interêt".

    Il s'agit d'exiger de ceux qui se soumettent au suffrage universel une maîtrise du fond, une compétence, et la prise en compte d'un type de raisonnement robuste, qui permet d'éviter de nombreux écueils, aphorismes et sophismes.

    Le débat gagnerait en clarté, honnêteté, et le pays serait mieux géré.


    Vous parlez ensuite d'"un crépuscule scientifique", je souhaiterais vous voir étayer un peu cette hypothèse que j'avoue ne pas comprendre.
    Je dirais plutôt qu'on est dans le stricte opposé de ce que je crois comprendre dans votre expression. Le progrès scientifique n'a jamais été aussi fulgurant et "reconnu" qu'aujourd'hui.

    En vérité, la subtilité vient de la distinction entre science et technique.
    Notre monde est éminemment technique aujourd'hui, mais nous nous éloignons de plus en plus d'un modèle de "société de la connaissance" - "l'art pour l'art" appliqué à la science.
    Certes les produits que nous consommons et côtoyons sont plus sophistiqués, mais il s'agit plus d'innovation au sens économique, que de découvertes scientifiques.
    On invente/recycle pour vendre, mais fondamentalement rien de nouveau.

    Le nombre de chercheurs qui se consacrent à la recherche fondamentale, ou qui étudient une/des disciplines jusqu'aux limites du connu, diminue incroyablement vite. Dans une grande école, que je ne citerai pas, on compte sur les doigts de deux mains les étudiants qui poursuivent leur cursus par une thèse en Physique/Maths.

    Il y a 30 ans, avec des promos deux fois plus petites, ils étaient 5 à 6 fois plus.

    Bref' en Occident, homo economicus a supplanté homo scientificus, d'où le déclin annoncé à terme.


    Le fait est que politiques comme simples citoyens, tout le monde invoque la science, la raison, pour supporter ses arguments.

    Oui, nous sommes dans une société du paraître, de l'artificiel.
    De nombreuses personnalités avancent des chiffres sans les comprendre, prétendent argumenter à l'aide de concepts qu'elles ne maîtrisent pas...
    C'est justement ce que je dénonce dans mon premier poste.

    la science est liée au débat public

    Il s'agit souvent d'un écran de fumée. Les plus grands vulgarisateurs comme Allègre, ou les frères Bogdanov font l'unanimité contre eux dans les cercles scientifiques.
    Certains instrumentalisent la science à des fins partisanes.

    La recherche ne peut nous aider qu'à répondre à la question Comment ?, et certainement pas à la question Pourquoi ?.
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    Message par [Grognard]_Gourgaud Mar 10 Déc 2013 - 17:54

    C'est tellement beau ce que tu as dit Brumaire  De la nullité scientifique des politiques 424776184 
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    Message par Fortuna Mar 10 Déc 2013 - 18:29

    Ne pinaillons pas sur le terme "technocratique", c'est sur celui de "scientifique" où il y a mésentente. J'ai pris une acception large du mot, toi tu l'as restreinte aux seuls chercheurs scientifiques. M'enfin ne perdons pas de temps là-dessus, nous sommes tous deux d'accord : "L'idée de mon post n'était pas d'encourager la constitution de groupes anti-démocratiques, qui parce qu'ils sont "sages", et "omniscients" peuvent gouverner sans le peuple, "dans son propre interêt"".

    L'économie peut être envisagée sous une perspective scientifique à base de calculs, théorèmes, et autres algorithmes. "en ce sens qu'elle ne peut établir de vérité "une fois pour toute"" : c'est un principe commun à toutes les sciences qu'elles soient humaines ou naturelles ! Si tu t'es plongé un peu dans l'âpre discipline qu'est l'épistémologie, tu te souviens sans doute de la notion poppérienne de réfutabilité : un énoncé est scientifique s'il est falsifiable. D'ailleurs il n'y a qu'à voir comment la physique quantique est entrain de chambouler notre vision jusqu'alors newtonienne du cosmos.

    Concernant le coeur du débat, je ne pense pas que le problème vienne de la formation des membres de notre classe politique. Pour avoir suivi un cursus juridique, je peux te dire qu'il y a une emphase conséquente mise sur la qualité et la fluidité des raisonnements produits. Sachant qu'une majorité des hommes politiques a suivi des études analogues, je doute qu'ils soient incapable de rigueur, de discipline et de finesse d'esprit (à quelques exceptions près, tu en as cité une).
    Je suis convaincu que le problème de notre classe politique vient plutôt des logiques électoralistes imposées par les institutions de notre 5ème République vieillissante (euphémisme), ainsi que des carcans imposés par les appareils de conquête du pouvoir : les partis politiques.

    Enfin concernant l'état de la recherche, je ne connais que trop peu le cas particulier de la France aussi m'abstiendrai-je de le commenter, en revanche à l'échelle mondial se produit l'inverse de ce que tu sembles indiquer.
    "Certes les produits que nous consommons et côtoyons sont plus sophistiqués, mais il s'agit plus d'innovation au sens économique, que de découvertes scientifiques" : insinuerais-tu que nous nous trouvons face à une aporie de la science ? Ou du moins que les découvertes dignes de ce nom diminuent ?
    Si c'est le cas, et sans condescendance aucune, tu te trompes. Jamais dans l'histoire de l'humanité les découvertes scientifiques ne sont allées d'un si bon train. Rappelle toi que derrière tout ce que tu appelles en disqualifiant "les innovations techniques", il y a d'abord des victoires de la science ! Il y a trente ans le prix d'une carte SIM se chiffrait en milliers de dollars, aujourd'hui on arrive à imprimer des circuits microscopiques pour une poignée d'euros... La recherche fondamentale et les sciences appliquées ne sont pas deux domaines totalement déconnectés, la première a une influence évidente sur les secondes, mais les secondes peuvent également permettre à la première d'avancer ! En effet, en perfectionnant les instruments de mesure, l'ingénierie, la technique permettent de tester des théories et donc d'accélérer le rythme des découvertes. Ne résumons pas tout à la création destructrice schumpeterienne.
    En physique quantique (théorie des cordes, wormholes, et tout un tas d'autres vocables que je ne maitrise absolument pas), en synthèse du vivant (certains préfigurent déjà les avancées dans ce domaine sous le titre de 4ème révolution industrielle), en neuroscience, les nanotechnologies, bref dans tous les domaines des sciences naturelles les avancées de ces dernières années sont stupéfiantes... Et ce phénomène ne semble pas s'étioler bien au contraire.

    D'ailleurs j'improvise une explication au nombre réduit d'étudiants en recherche fondamentale : ils s'expatrient sûrement de plus en plus vers les centres à la pointe des domaines étudiés (presque tous trustés par les Etats-Unis).  

    L'instrumentalisation est en effet un danger. Il faut donc faire oeuvre de pédagogie. Certains le font parmi nos politiques (quelques irréductibles...), et certains savants également semblent décidés à adopter ce cheval de bataille (le problème étant à nouveau la dérive d'un débat public phagocyté par des experts ostracisant les ignares...).

    J'aime beaucoup ta dernière phrase.
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    Message par [Grognard]_Cosak Mar 10 Déc 2013 - 18:54

    Bien que Brumaire l'ait déjà rappelé, un scientifique au pouvoir n'a absolument rien à voir avec le terme "technocratie". Le seul cas que je connaisse sont dans des califats où des grands vizirs étaient régulièrement piochés parmi des mathématiciens ou des philosophes (notamment chez les Seldjuks).

    Je ne vois pas en quoi technocratie et démocratie sont opposées, ou liées. On peut élire des technocrates, et on peut aussi dire que Staline était un pur technocrate. Ce sont donc des notions indépendantes (au sens statistique).

    Dernière remarque qui touche un stéréotype : l'utilisation des chiffres n'a rien de "scientifique". Ce serait comme confondre l'utilisation des adjectifs et la pratique de la philosophie. Qu'un politique ou un économiste sache interpréter des statistiques requiert un brin de méthode, et d'honnêteté, mais on est loin de la "science".

    Evoquer le "crépuscule scientifique" ne signifie pas qu'il n'y a plus rien... Fortuna cite les nanotech, les OGM, etc. Qu'on soit pour ou contre, l'avance scientifique est bien là. Mais ces domaines vont connaître un seuil, comme l'informatique par exemple, où les recherches tant mathématiques (proc ADN ou quantiques) que physique (couches lithium, pipeline macro) ont très nettement baissé depuis quelques années car la rentabilité actuelle est jugée suffisante pour ne plus s'emmerder avec la recherche fondamentale.

    Quant à Polytechnique, je la cite car c'est le meilleur exemple. Je peux aussi citer l'Ecole Centrale, qui concerne Brumaire et moi-même (à 14 ans d'intervalle). Sur l'ensemble de ma promo, il n'y a plus que quelques individues (dont moi) dont l'activité principale est liée à la science. Tous les autres sont dans le management (la marotte de tous les ingénieurs des grands corps) ou les front-office. J'ai passé une année à Princeton, et là les bons en science restent dans la science, sans honte. Impensable en France pour les filières prestigieuses (sauf, encore une fois, les Ecoles Normales).

    Le seul scientifique de haut-niveau ayant voix au chapitre en France est Cédric Villani. Brillant mathématicien, mais qui ne doit finalement sa (modeste) portée médiatique qu'au fait de s'habiller comme un dandy.

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    Message par Fortuna Mar 10 Déc 2013 - 19:16

    Bien évidemment que la technocratie et la démocratie sont opposées : dans un cas c'est le pouvoir aux savants, aux experts (aux techniciens si vous préférez le terme), dans l'autre c'est le pouvoir au peuple. Dans l'un il y a séparation des citoyens entre ceux qui possèdent le savoir (la science) et les autres, dans le second tous les citoyens sont sur le même pied d'égalité. On part donc sur deux postulats considérablement éloignés.
    La démocratie n'empêche pas d'élire qui que ce soit tant que les institutions permettent au peuple de s'exprimer et de voter. On peut donc bien évidemment élire un savant, un expert sans pour autant faire du système une technocratie.
    Concernant Staline, tu confonds bureaucrate et technocrate.
    C'est presque vexant que tu m'accuses de faire l'amalgame entre méthode scientifique et utilisation des mathématiques... Mais je persiste: les sciences économiques constituent précisément une méthode scientifique appliquée aux phénomènes économiques.
    La recherche fondamentale existe toujours, ne piétine pas, et ne tend pas à s'estomper. Les logiques mercantiles n'ont pas entamé deux qualités intrinsèques à notre espèce : la curiosité et l'imagination.
    Tu parles des grandes écoles où effectivement le pantouflage règne en maître. C'est sans aucun doute un sérieux problème, mais n'oublions pas que les grands corps de l'Etat ne constituent qu'une infime minorité de ce qu'on appelle la recherche. Que fais-tu des universités, du CNRS...

    Ma réponse est brève et lacunaire, ce débat m'intéresse, j'y reviens après le judo.
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    Message par [Grognard]_Cosak Mar 10 Déc 2013 - 19:49

    Fortuna a écrit:Bien évidemment que la technocratie et la démocratie sont opposées

    Comme souvent quand on commence par argumenter en disant "bien évidemment que", et bien c'est faux. Ce dont parle Fortuna (le pouvoir exercé par le peuple), c'est une variante de la démocratie : la démocratie directe. Celle-ci n'a existé que de façon éphémère dans des cités-états grecques et en Catalogne dans les années 1930.

    La démocratie que nous connaissons est la démocratie représentative. Je vote pour un député, qui va voter les lois. Personnellement je n'ai aucun pouvoir, juste le droite de vote. Celui qui est au pouvoir dans un démocratie en temps de paix est forcément un technocrate, car la "technique" ici évoquée est celle du droit ou de l'économie. On taxe souvent l'UE d'être une technocratie, mais il ne doit pas y avoir 1% de scientifiques dans les innombrables commissions.


    Fortuna a écrit:dans le second tous les citoyens sont sur le même pied d'égalité

    Aberrant de naïveté. On t'a invité à l'Assemblée pour voter des lois ? Ou pour voter le budget de la police ? Ou pour envoyer l'armée au Centrafrique ?

    La France, comme tous les pays occidentaux, est une technocratie car tous les gens qui arrivent au pouvoir (je ne parle pas que du président) en connaissent à l'avance tous les rouages et s'engagent implicitement à les maintenir tels quels. Leurs décisions sont prises en fonction des lois et règles existantes, et pas en fonction d'idéaux ou des principes philosophiques. La technocratie peut donc s'appliquer tout autant à une démocratie qu'à une dictature sanguinaire.

    Quant à Staline, les purges de 1936-38 commencent par l'éradication des idéologues (issus de la Révolution d'Octobre), pour ne placer des technocrates malléables à leur place. Des gens qui vont être aptes à appliquer le régime stalinien sans émettre d'avis politique. C'est par définition un technocrate. Et Staline, dans sa compétition pour l'après-Lénine contre Trotsy, s'était lui-même défini comme un technocrate face à un "terroriste post-révolutionnaire". Staline avait comme modèle Robespierre, l'inventeur autoproclamé de la technocratie.

    En résumé, rien de ce qui est présenté comme évident par Fortuna n'est en fait juste. Mais ce n'est qu'une digression dans le débat sur la science.



    Fortuna a écrit:Tu parles des grandes écoles où effectivement le pantouflage règne en maître. C'est sans aucun doute un problème, mais n'oublions pas que les grands corps de l'Etat ne constituent qu'une infime minorité de ce qu'on appelle la recherche. N'oublie pas toutes les universités, le CNRS...

    Si je parle de l'X et Centrale de façon aussi péjorative, c'est que si on valorisait la vrais scientifiques venant de l'université au même niveau que les 80% des andouilles des pseudo-Grandes Ecoles, ça irait bien mieux au niveau scientifique en France.

    Et je suis d'accord avec le fait que la recherche fondamentle est trustée à 90 % par les Etats-Unis, mais pour une raison biaisée : les militaires y investissent énormément.
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    Message par [Grognard]_Brumaire Mar 10 Déc 2013 - 21:58

    Fortuna a écrit:
    L'économie peut être envisagée sous une perspective scientifique à base de calculs, théorèmes, et autres algorithmes.

    Remarque très incomplète. L'économie est duale : partagée entre modélisation et interprétation ou commentaire. Il existe différentes "écoles", ce qu'on ne trouve dans aucune science depuis des siècles.

    Note bien que je parle d'écoles - pas de théories-, c'est à dire de doctrines qui prétendent décrire le même monde et s'excluent mutuellement.
    Les économistes ne s'entendent, la plupart du temps, même pas sur les fondamentaux : entre keynésiens, classiques, schumpéteriens, néo-classiques, néo-keynesiens...
    On est bien plus proche de systèmes philosophiques traduits (parfois) mathématiquement que de sciences !


    D'ailleurs il n'y a qu'à voir comment la physique quantique est entrain de chambouler notre vision jusqu'alors newtonienne du cosmos.

    Je serai ravi d'en discuter, mais s'il ne s'agit que d'une référence culturelle pour briller dans une discussion, elle est malvenue. En l'occurence, la formulation est au mieux ambiguë, au pire ignorante.

    La Physique Quantique unifie 3 des 4 grandes forces connues, et permet essentiellement de décrire l’infiniment petit, ou les instants primordiaux de l'univers. Elle n'intègre pas la gravitation et la relativité générale, qui, justement, décrivent le cosmos que tu mentionnes.

    je peux te dire qu'il y a une emphase conséquente mise sur la qualité et la fluidité des raisonnements produits.

    Une trop grande fluidité peut vite conduire à la catastrophe.
    Le danger, c'est de ne plus se poser de question.
    De trop privilégier le style, par rapport au fond.

    Jamais dans l'histoire de l'humanité les découvertes scientifiques ne sont allées d'un si bon train. Rappelle toi que derrière tout ce que tu appelles en disqualifiant "les innovations techniques", il y a d'abord des victoires de la science ! Il y a trente ans le prix d'une carte SIM se chiffrait en milliers de dollars, aujourd'hui on arrive à imprimer des circuits microscopiques pour une poignée d'euros... La recherche fondamentale et les sciences appliquées ne sont pas deux domaines totalement déconnectés, la première a une influence évidente sur les secondes, mais les secondes peuvent également permettre à la première d'avancer !

    Là encore, je renouvelle ce que j'ai dis. Les sciences appliquées progressent, mais comme l'a justement dit Cosak, la recherche fondamentale pâtine, notamment parce qu'elle manque de moyens (humains et financiers).

    Comme quasiment tout l'effort de recherche est orienté vers la vente, les retombées sont faibles pour les labos...Il s'agit à mon sens d'un changement profond de société.

    Il y a quelques siècles, voire décennies, les carrières les plus en vues et reconnues étaient militaires/diplomatiques, scientifiques et artistiques.
    Aujourd'hui, la plupart des jeunes brillants s'orientent dans les filières financières, économiques, médicales et parfois juridiques/politiques.

    Le contraste est saisissant !
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    Message par Fortuna Mar 10 Déc 2013 - 22:56

    Bon tout d'abord posons les bases d'un débat sain et constructif si on veut aller quelque part, si c'est un concours de rhétorique façon qui a la plus grosse, ça ne sert à rien. Cosak évite je te prie de disqualifier ton adversaire avec des remarques acerbes où pointent le mépris. Si ça peut t'éviter la condescendance : là où tu es diplômé de centrale, je suis diplômé de science politique.

    Concernant ta première remarque, je pense que tu confonds deux choses : l'idée (au sens platonicien) de la démocratie, et la pratique effective de la France sous la 5ème République. Dans mes propos précédents je discutais la démocratie au sens abstrait : idéel et idéal, celle que nous a légué une longue tradition philosophique politique. Tu me fais un cours sur les déclinaisons issues de la pratique politique, de la praxis. Moi, je parle d'un idéal-type qu'on atteindra jamais parfaitement mais vers lequel on peut s'efforcer de se rapprocher.
    Alors au risque de paraître pédant, un peu de grec (car la notion philosophique est issue de la tradition hellénistique après tout) : dêmos => peuple, kràtos => le pouvoir, la souveraineté. Comme on pourrait parler d'une kleptocratie, d'une ochlocratie, d'une bureaucratie, et tiens d'une technocratie... Tous renvoyant à des régimes politiques bien distincts, et toutes ces notions n'étant que des idéaux-types c'est-à-dire n'existant pas dans la réalité (avec des régimes politiques beaucoup plus bigarrés) mais servant d'autant d'outils à la réflexion.
    "Personnellement je n'ai aucun pouvoir, juste le droite de vote" : petite parenthèse qui pourrait ouvrir un autre débat : cette assomption n'est qu'un point de vue subjectif. Je considère à l'inverse que le droit de vote est un sacré pouvoir, et que cet acte politique témoigne d'un certain degré de souveraineté des citoyens !

    Par goût du challenge intellectuel, je relève le défi : la France n'est pas une technocratie. La France n'est pas une technocratie par le simple fait que les processus d'accession au pouvoir ne sont pas technocratiques : les personnes au pouvoir sont élues ! C'est une différence majeure : dans une technocratie on sélectionne les dirigeants en fonction de logiques internes de performances, d'érudition, de degré de compétence technique. Il n'y a aucune place pour la politique : pas d'élections (mais une sorte de sélection méritocratique) donc pas de légitimité. "Les modèles de société technocratiques où les experts, guidés par des modèles scientifiques de production et de société, sont directement au pouvoir, n'ont jamais été véritablement appliqués. En revanche, la science et la technologie prenant une place de plus en plus importante dans les sociétés développées, il existe forcément des articulations et des rapports de force - tacites ou non - entre les scientifiques et experts techniques et les hommes politiques au pouvoir". Je pense que tu te méprends sur l'acception du terme que nous discutons, il y a une différence sensible entre avoir des dirigeants avec un savoir technique, et un régime politique dit technocratique.

    Merci de faire référence à ma naïveté, toutefois je te rappellerai que ceux qui débattent, votent ou décident collégialement tout ce que tu mentionnes, ont été élus. On peut discuter sur le niveau de la France sur l'échelle démocratique (malheureusement bien loin du pinacle je le crains), toutefois les décisions prises par nos représentants comportent un certain degré de légitimité.

    Staline n'était pas un technocrate puisque son ascension au sein de l'appareil communiste correspond à des logiques dites bureaucratiques. Staline n'était pas un idéologue, un spécialiste, un technicien.

    Si tu lis l'oeuvre de Robespierre et t'intéresses à ses exégèses, tu constateras que Robespierre ne s'est jamais revendiqué technocrate, au contraire il appelait à lutter contre cette dérive s'opérant à l'encontre du peuple.

    Pardonne moi si j'ai présenté tout ça comme évident, je pense que ça t'as agacé, ce n'était pas mon intention.
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    Message par Fortuna Mar 10 Déc 2013 - 23:40

    Brumaire, de même je serais ravi de poursuivre cette discussion de vive voix sur TS Smile

    Je reprends rapidement : nous ne sommes pas d'accord sur la place de l'économie dans les champs disciplinaires. Je considère les sciences humaines comme des sciences, je pense qu'il y a la place pour une méthode scientifique falsifiable et épistémologiquement satisfaisante.
    Il me semble d'ailleurs que poussées à leurs extrémités en termes de complexité et d'expertise, les sciences dites naturelles convergent également vers ce point. Ne dit-on pas que certaines hypothèses scientifiques confinent à des postures philosophiques (l'idée de "la nature jouant aux dés" heurtant l'esprit d'Einstein...) ?
    Bon ceci dit je reconnais volontiers ne pas être un chercheur en sciences dures, ni un spécialiste de ces questions (qui me fascinent pourtant). Mais l'idée que j'avançais est que malgré les apparences: le doute, les changements de paradigmes, les erreurs tout bonnement existent au sein même de la Science avec un grand "s" au même titre que dans les sciences humaines. Après tout les scientifiques ne sont que des hommes.

    Concernant le bouleversement sur notre vision de l'univers qu'apporte la physique quantique, encore une fois à mon humble niveau, il m'avait semblé comprendre que la façon dont fonctionne comme on l'observe l'infiniment petit, heurte le sens commun (certains physiciens américains disent qu'il faut être absurde, illogique quand on s'attaque à ce domaine), et entre en contradiction avec par exemple la façon dont la gravité fonctionne dans un schéma de mécanique newtonienne classique. D'où la difficulté de créer une théorie du tout, unifiant l'infiniment grand et l'infiniment petit, et d'où (corrige moi si je me trompe) les interrogations quand à la justesse et à la complétude de la vision newtonienne de la physique.

    Pour les études juridiques, permets moi de parler de ma propre expérience de bonne foi : la forme n'est pas tout dans ce cursus, ni même l'essentiel. On apprend d'abord une méthode, ensuite on augmente la somme des connaissances pour pouvoir raisonner sur le fond d'un problème juridique, et ensuite on met en forme. C'est pour ça que je pense que nos hommes politiques ne sont pas dénués de cette faculté de raisonner, mais qu'ils choisissent de s'en défaire volontairement face aux impératifs de la pratique politique (luttes de pouvoir, communication, logique partisane, etc...).

    Finalement lorsque tu évoques les manques de moyens de la recherche fondamentale, permets moi derechef d'exprimer mes doutes à ce sujet. Je pense que les Etats, mais aussi les forces économiques, les individus en général ont tous intérêts aux avancées dans ce domaine (et ils en ont conscience). Il faudrait qu'on délimite dès maintenant les frontières du sujet : parle-t-on de la France, ou du monde ? La construction du Large Hadron Collider, les prêts de fusées pour les missions scientifiques dans l'espace, l'émergence d'une communauté scientifique mondiale de plus en plus interconnectée, sont pour moi autant d'exemples allant dans le sens d'un renforcement de la recherche.
    Tu as raison d'indiquer que les logiques économiques ont pris une envergure sans précédent, mais je pense que tu sépares trop celles-ci de la recherche fondamentale. Sans même parler des financements publics et des oeuvres philanthropiques, le monde économique est aujourd'hui tourné vers la science, et la recherche fondamentale n'échappe pas à la règle puisqu'elle est corrélée aux innovations pratiques/techniques. De façon anecdotique je peux te dire qu'en tant que lecteur assidu du magazine américain Foreign Affairs qui traite de la conduite des relations internationales, des crises économiques et politiques etc... J'ai constaté une recrudescence des articles s'intéressant aux sciences... A tel point que j'ai parfois l'impression de feuilleter un magazine scientifique... Le fait est que la science devient incontournable puisqu'elle façonne le monde de demain, le politique plus que tout autre se doit d'être au courant et de promouvoir ce savoir (ce qu'on retrouve peut-être moins ici en France ?).

    Je doute que les carrières scientifiques n'aient jamais été véritablement reconnus sur le plan social... D'abord parce qu'elles confèrent un capital économique et politique faible (et n'est-ce pas depuis bien longtemps les principaux éléments constituant le capital social?), ensuite parce qu'elles requièrent un investissement plus grand que d'autres métiers (vocation ?).

    PS : je serais curieux d'entendre les arguments développés par ton chercheur du CERN Smile
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    Message par [Grognard]_Cosak Mer 11 Déc 2013 - 0:21

    Fortuna a écrit:Cosak évite je te prie de disqualifier ton adversaire avec des remarques acerbes où pointent le mépris. Si ça peut t'éviter la condescendance : là où tu es diplômé de centrale, je suis diplômé de science politique.

    Je ne disqualifie pas l'interlocuteur, mais ses arguments. Goûtant aux joutes nihilistes, j'ai appris que l'apparente évidence est l'ennemie de la pertinence. En politique, en histoire, en biologie, en économie (surtout en économie !)...

    Si j'emploie un raisonnement stupide, ce qui arrive forcément, on est libre de me le stipuler directement, j'en serai reconnaissant. Mais il faut le démontrer.

    Après avori traité 80% des centraliens d'andouilles, je ne pense pas faire preuve de vanité en citant mon diplôme. Et d'ailleurs j'applique le même tarif à ScPo, également bouffis de certitudes navrantes.



    Fortuna a écrit:dêmos => peuple, kràtos => le pouvoir, la souveraineté. Comme on pourrait parler d'une kleptocratie, d'une ochlocratie, d'une bureaucratie, et tiens d'une technocratie... Tous renvoyant à des régimes politiques bien distincts

    L'étymologie est juste, mais l'étymologie n'est que la science des racines, et non du signifié (la sémantique). Les termes issus du kratos/archos se divisent en deux parties :
    • la source ou les détenteurs du pouvoir : anarchie, monarchie, aristocratie, oligarchie, démocratie, stochastocratie, ploutocratie, gérontocratie, etc. auxquels on peut rajouter la dictature,
    • la façon dont le pouvoir s'exerce : bureaucratie, doxocratie, technocratie, théocratie, etc.


    On peut mélanger deux à deux les termes de ces listes : monarchie théocratique (Saoud), démocratie technocratique (Europe), dictature bureaucratique (URSS)...

    Sur le fait de voter : le vote est un pouvoir limité à celui d'être 0,00001% d'une éventuelle majorité. C'est un pouvori réel pour lequel des millions de gens sont morts, et je leur en suis sincèrement reconnaissant en tant qu'immigré. Mais l'exercice du pouvoir est entre les mains des élus (ou nommés par eux). En démocratie, le pouvoir vient de la volonté du peuple, mais n'est pas exercé par lui (sauf dans l'exception de la démocratie directe).



    Fortuna a écrit:Staline n'était pas un technocrate puisque son ascension au sein de l'appareil communiste correspond à des logiques dites bureaucratiques. Staline n'était pas un idéologue, un spécialiste, un technicien.

    Ce n'était certes pas un idéologue, il était trop limité pour cela. Mais c'était un technicien. Un technicien de l'appareil politique, qui a géré l'URSS comme secrétaire général du parti. Or, comme en France dans l'administration, un secrétaire général est un gestionnaire. L'aspect technocratique du stalinisme est très fortement marquée par son aspect centralisé et planifié, avec des directives émises par diverses académies d'Etat, et une évaluation maniaque de la performance.

    Enfin, Robespierre et la technocratie... Lui-même ne s'est peut-être pas désigné ainsi (le terme étant un néologisme à l'époque). Mais à la Révolution l'alternative à la monarchie était peu connue : régime militaire (un peu comme Monk en Angleterre), ou la technocratie déjà appliquée chez les tout récents Etats-Unis (Washington, Adams, Jefferson sont des avocats). Il en a été exactement de même en URSS, avec un risque bonapartiste émanant dans les années 1930 de Toukhachevski.
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    Message par Seimour Mer 11 Déc 2013 - 1:29

    Fortuna a écrit:
    Je reprends rapidement : nous ne sommes pas d'accord sur la place de l'économie dans les champs disciplinaires. Je considère les sciences humaines comme des sciences, je pense qu'il y a la place pour une méthode scientifique falsifiable et épistémologiquement satisfaisante.
    Je risque de me faire mitrailler pour avoir exprimé mon opinion mais je tiens à clarifier le concept des sciences sociales. Elles sont souvent qualifiées de sciences "molles" parce qu'elles n'appliquent pas le modèle scientifique avec la même rigueur que les sciences "dures". Certaines écoles de pensées peuvent appliquer le modèle scientifique dans leur discipline mais beaucoup d'entre elles se déclarent antipositiviste. Cela implique qu'elles ne considèrent pas que la sphère sociale puisse être analysée comme le monde sensible ce qui rend la recherche empirique inapplicable. Un exemple qui me vient en tête serait l'école Freudienne ou Neo-Freudienne en psychologie qui est complètement infalsifiable et ainsi dénué de contenue scientifique.

    L'économie tombe dans la même catégorie parce que ce sont plutôt des idéologues et des commentateurs(interprétation sans recherches empiriques) qui sortent de ce genre de formation. Ils sont incapable de s'entendre entre eux et c'est une atmosphère d'équivalence dans le style "tout les opinions se valent en économie" qui y règne. L'école autrichienne d'économie est le meilleur exemple et domine la droite américaine depuis plusieurs décennies avec des résultats peu encourageant. Elle est notamment connu pour son rejet de l'application des mathématiques et de la modélisation  en économie ce qui la transforme en pure idéologie tout à fait non-scientifique réduite à commenter les erreurs des autres sans apporter de véritable solution.

    Bref, les sciences sociales sont infiltrées profondément par la politique et les intérêts particulier et à ce titre, je ne pense pas qu'elles puissent être aussi fiable ou même se comparer aux sciences naturelles sans toutefois êtres moins intéressantes. Il est possible d'être crédible dans ce domaine sans démontrer sa théorie ce qui n'est pas possible dans les sciences dures(Enfin, j'espère). Je ne dis pas que les sciences naturelles ne sont pas assujetti à d'autres intérêts que la science en elle même mais ce n'est pas au même degré où de la même façon.


    Dernière édition par [Grognard]_Seimour le Mer 11 Déc 2013 - 1:38, édité 1 fois
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    Message par Fortuna Mer 11 Déc 2013 - 1:37

    Content de voir que le ton semble plus apaisé, on arrivera à un véritable échange, à mettre le doigt sur nos éventuelles divergences que par ce biais.

    Je n'en démordrai pas, bureaucratie et technocratie recouvrent des réalités sensiblement différentes. On peut parler d'une certaine technicité de la tâche administrative, mais ça n'est pas la même chose que de confier le pouvoir à des experts en fonction précisément de leur expertise dans un domaine. L'exemple de Salazar me semble illustrer parfaitement une dérive technocratique qui aboutit à une dictature (savoir théorique important en matières économiques => remède à la stagnation du pays => accession au pouvoir).

    En extrapolant à peine ton argumentation : quasiment tous les régimes politiques de l'histoire ont été technocratiques. Au Moyen-Âge les nobles/le suzerain n'occupaient-ils pas leur position grâce à leur degré d'expertise dans le domaine militaire ?
    Je ne souscris pas à ta distinction des formes de régimes politiques. Toutes les notions que tu cites renvoient à des sociétés valorisant/confiant le pouvoir à des sujets différents en fonction de certaines qualités précises. L'existence d'un champs lexical distinct est d'ailleurs univoque : on parle d'un monarque, d'un aristocrate, d'un oligarque, mais aussi d'un technocrate, d'un théocrate etc... Pourquoi une telle profusion tautologique ? C'est abscons. Attachons-nous donc à la lettre, tournons-nous vers les définitions canoniques de ces mots et voyons !
    Ce mélange "monarchie théocratique" ne semble pas rencontrer beaucoup de succès après une rapide recherche google... C'est un peu du bidouillage sémantique tu ne penses pas (à la sauce historio-politico-juridico-scientifico-philosophique comme dirait Pangloss) ?

    Pour abandonner les idéaux-types et les notions purement philosophiques, on est bien d'accord on se situe plutôt dans un régime du type démocratie représentative.

    Alors sur Robespierre : non ! Cosak, Robespierre est le parangon du démocrate d'avant l'heure ! Dans ses idées, dans ses luttes, il est bien loin d'une conception technocratique du pouvoir en admettant l'anachronisme.
    Mais tu dois bien remarquer tout de même que tu considères technocrates tous ceux qui disposent d'un savoir technique ! Alors comment définirais-tu un non-technocrate ? L'homme étant par définition un technicien, qu'il soit ouvrier, artiste ou avocat, la tâche me semble malaisée. Nous ne sommes définitivement pas d'accord sur le sens que recouvre ce mot. Je pense à une reproduction institutionnelle, à des processus de désignation, à une séparation entre les experts et le reste de la population. Toi, tu avances simplement une qualité commune à tous les être humains... La technique.
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    Message par Fortuna Mer 11 Déc 2013 - 2:03

    Seimour, personnellement je ne te "mitraillerai" jamais tant que tu t'exprimeras avec respect.

    Délestons immédiatement l'objet disciplinaire des impostures (ou théories disons pour les mieux intentionnées) plus ou moins reconnues type école autrichienne, car elles existent aussi dans les sciences dures désignées sous le vocable de pseudo-science (définition Wikipédia valant ce qu'elle vaut : "est une démarche prétendument scientifique ou utilisant le langage de la science mais qui ne respecte pas les canons de la méthode scientifique, dont le principe de réfutabilité").

    On entre ensuite dans un autre débat qui existe depuis l'essor des sciences sociales modernes : les sciences sociales sont-elles véritablement scientifiques? Les positivistes abondent dans ce sens : Durkheim, Comte, sous une autre forme Bourdieu... Pour avoir pratiqué cette discipline (méthodes quantitatives et qualitatives appliquées), je pense qu'il est éminemment difficile d'atteindre une rigueur dite scientifique en sciences sociales. Ca supposerait presque une schizophrénie du sociologue, à la fois objet et chercheur (par pure provocation : ne serait-ce pas la même chose en sciences naturelles ? Ne sommes nous pas finalement un tas d'atomes étudiant d'autres atomes ?). Pourtant je ne dirais pas que c'est totalement impossible.


    Je concède toutefois qu'il est souvent bien plus compliqué d'expérimenter en sciences sociales, et que le degré d'abstraction (et donc les récupérations axiologiques) est également plus important.

    Ps : peut-être serait-ce plus facile de converser tous ensemble à l'oral sur TS ? Smile
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    Message par [Grognard]_Cosak Mer 11 Déc 2013 - 12:29

    Fortuna a écrit:Ps : peut-être serait-ce plus facile de converser tous ensemble à l'oral sur TS ?

    Je ne discute pas sur TS avec des non-Grognards  De la nullité scientifique des politiques 953032877 
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    Message par [Grognard]_Brumaire Mer 11 Déc 2013 - 19:09


    Belle synthèse de Seimour.
    L'exemple de l'école autrichienne est très pertinent et l'existence de "pseudo-sciences" est un peu faible pour établir une analogie avec les sciences que tu nommes "dures".

    Fortuna, on peut débattre sur la signification du mot "science" et son acceptation, mais la différence d'essence entre les mathématiques/la physique/les sciences nat' et la sociologie (ou l'économie) me paraît indiscutable, en théorie, mais encore plus en pratique !

    Je trouve ce débat finalement assez révélateur : le scientifique adopte un vocabulaire précis et restreint, excellant dans l'analyse, là où son alter-ego des sciences humaines synthétisera brillamment, mais en perdant par la même occasion, une partie de l'exactitude et de l'essence de ce qu'il décrit.

    En ce qui concerne ton raisonnement sur l'augmentation des crédits, il comporte plusieurs hypothèses, que je considère comme inexactes :
    -Que les acteurs économiques ont conscience de ce qu'est leur interêt à long terme
    -Que les acteurs économiques pensent à (très) long terme

    Le propre de la recherche fondamentale est d'ouvrir des perspectives nouvelles, et donc d'offrir surtout des retombées indirectes, à très très long terme (30-40-50 ans, voir plus !).
    C'est pourquoi dans un système capitalistique financier tel que le nôtre, il faut d'avantage compter sur les états et fondations que sur les entreprises pour la financer.




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    Message par [Grognard]_Marbot Mer 11 Déc 2013 - 19:16

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    Message par Fortuna Mer 11 Déc 2013 - 19:30

    Ce qui fait d'une science précisément une science c'est l'utilisation de la méthode scientifique. M'enfin sachez que ce n'est pas une vue de l'esprit, une grande partie de la doctrine (épistémologie, philosophie des sciences) considère les sciences sociales comme des disciplines scientifiques à part entière. Je m'interroge : avez-vous suivi des cours de sociologie ? De méthodologie en sciences sociales ?
    Je reprends ce qu'a dit Cosak précédemment : il faut se méfier des évidences. Ce n'est pas parce qu'un phénomène social est différent d'un oiseau, du fonctionnement des neurones, ou d'une particule subatomique, qu'il ne peut pas être appréhendé de manière scientifique. La dénomination d'un fait social peut avoir une grande exactitude et répondre à des exigences méthodologiques scientifiques. Je ne me propose pas de faire un cours de sociologie, mais si ça vous intéresse je vous invite à lire ""les Règles de la méthode sociologique" d'Emile Durkheim.
    Du reste, je pense qu'on peut en rester là nous ne sommes vraisemblablement pas d'accord.

    Concernant les avancées de la science, je t'assure que la littérature outre-atlantique a un tout autre regard sur ce que tu définis comme un recul. Les questions et problèmes posés seraient même tout à fait contraire !! Aujourd'hui de nombreux lanceurs d'alerte du monde scientifique se préoccupent de cette course effrénée que prend l'aventure du progrès ! Je t'invite à lire ce qui s'écrit sur la manipulation génétique par exemple.


    Dernière édition par Fortuna le Mer 11 Déc 2013 - 19:31, édité 1 fois
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    Message par [Grognard]_Cosak Mer 11 Déc 2013 - 19:30

    [Grognard]_Brumaire a écrit:Le propre de la recherche fondamentale est d'ouvrir des perspectives nouvelles, et donc d'offrir surtout des retombées indirectes, à très très long terme (30-40-50 ans, voir plus !).
    C'est pourquoi dans un système capitalistique financier tel que le nôtre, il faut d'avantage compter sur les états et fondations que sur les entreprises pour la financer.

    Tout à fait exact. Il faut être conscient que l'immense majorité de l'industrie high-tech mondiale actuelle vit sur les fruits de la guerre froide : aviation, informatique (dont Internet), physique des matériaux, optique, etc. Et pas seulement venant des Américains.

    Par exemple on voit que l'approche cuivre/silicium des transistors est à bout de souffle, et que les processeurs stagnent depuis 5 ou 6 ans. De même pour l'avionique, et bien d'autres secteurs où 90% des innovations sont de nature économique (comment produire moins cher, ou que ça consomme moins).

    La dernière avancée majeure (à mon avis) en physique appliquée a été au niveau de la magnétohydrorésistance, grâce au développement du bombardier B2. Cela pourra avoir des conséquences dans la vie courante grâce aux supraconducteurs liquides (ou plasma) ou à des trains à grande vitesse. Mais cela est la conséquence d'une recherche démarrée dans les années 1940.

    Il est navrant de constater que la recherche militaire a été le moteur de l'innovation dont nous bénéficions à présent. La seule exception que je connaisse est le domaine des biotechnologies (que cite Fortuna), qui avance à grands pas (au grand dam de certains), indépendamment des soutiens gouvernementaux.

    La sociologie n'a de rapport avec les vraies sciences que dans son utilisation des statistiques. Sinon c'est de la littérature ou de la politique. Ce n'est absolument pas péjoratif, mais le terme "science" ne doit pas servir à conférer une aura superflue.
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    Message par [Grognard]_Cosak Mer 11 Déc 2013 - 19:36

    Pitié, peut-on aborder une discussion sur la société sans évoquer Durkheim ou Bourdieu. Ma santé mentale (et mon hygiène morale) en dépend. En contrepartie je m'engage à ne pas citer Spinoza ou Lyssenko (tout aussi compétents dans leur domaine).

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